L’article 209 de la loi du 23 novembre 2018 impose de mettre en conformité les règlements de copropriété.
Pour cela, elle contraint le syndic à insérer dans chaque convocation d’assemblée générale la question de la mise en conformité du règlement de copropriété qui peut se voter à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance.
Une difficulté reste en suspens qui est de savoir quelles sont les mises en conformité qui peuvent se voter à la simple majorité de l’article 24 (voix des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance).
Suite à notre saisine auprès de la chancellerie (voir article « L’ARC saisit le ministère de la Justice concernant la mise en conformité du règlement de copropriété » qui a organisé une réunion de travail au sein du CNTGI, nous avons obtenu une réponse informelle qui soyons clairs n’engage pas le magistrat en cas de recours judiciaire.
I. L’étendue de la mise en conformité
Conformément au même article 209 de la loi ELAN, au-delà de la simple actualisation des dispositions légales qui peuvent figurer dans le règlement de copropriété, ce dernier doit mentionner les parties communes spéciales ou à jouissance privative lorsqu’elles existent.
L’absence de cette mention expresse dans le règlement de copropriété implique soit une absence de droit de jouissance privative soit une impossibilité d’appeler des charges sur la base d’une clé spéciale (telle qu’une clé bâtiment).
Autrement dit, en l’absence dans le règlement de copropriété de la mention d’une clé spéciale pour un bâtiment B par exemple, cela entrainerait que l’ensemble des copropriétaires seraient tenus de participer aux charges de ce bâtiment y compris les copropriétaires du bâtiment A, C et D qui ne profitent pas directement des travaux dont le bâtiment B bénéficie.
D’ailleurs, ce même article a introduit un article 6.4 dans la loi du 10 juillet 1965 qui précise que l’existence des parties communes spéciales et celles à jouissance privative est subordonnée à la mention expresse dans le règlement de copropriété.
Une disposition qui entraine des conséquences très lourdes qu’elles soient juridiques, comptables ou financières.
II. A quelle majorité se vote cette mise en conformité ?
A priori, cette nouvelle exigence prévue par la loi qui interdirait d’appeler des charges sur la base d’une clé spéciale, sans mention expresse de partie commune spéciale dans le règlement de copropriété, entrerait en vigueur uniquement à partir du 25 novembre 2021, soit trois ans après l’entrée en vigueur de la loi ELAN.
En effet, le législateur a donné au syndicat des copropriétaires trois ans pour mettre en conformité le règlement de copropriété impliquant une tolérance avant cette date.
On peut donc supposer qu’à partir du moment où le règlement de copropriété prévoit une grille de répartition de charges spéciales, mais une absence de mention expresse de parties communes, cela suffirait pour que le syndic puisse en faire usage et appeler sur cette base.
En revanche, au-delà du 25 novembre 2021, la règle sera plus rigide à savoir qu’en l’absence de l’une des deux informations, à savoir la mention d’une partie commune spéciale ou d’une grille spéciale, le syndic sera contraint d’appeler sur la base de la clé générale.
La seconde question à aborder est la majorité permettant d’intégrer dans le règlement de copropriété une partie commune spéciale ou un droit de jouissance privatif.
Selon l’analyse de la chancellerie, il faut distinguer deux cas : l’existant ou l’inexistant.
A partir du moment où le règlement de copropriété ne fait mention ni de parties communes spéciales ou de droit de jouissance privatif, ni de grille spéciale, la création de parties communes spéciales qui a un impact sur le droit de propriété nécessite d’obtenir de l’assemblée générale la majorité de l’article 26.
En revanche, si dans le règlement de copropriété figure une présomption de partie commune spéciale soit du fait qu’il en fait état sans être accompagné d’une grille de répartition, soit la présence d’une grille de répartition sans mention expresse de parties communes spéciales, cela suffirait pour voter la mise en conformité à la majorité de l’article 24.
Il s’agirait bien d’une majorité dérogatoire accordée par le législateur pour permettre aux copropriétés de disposer de bases statutaires saines.
Autrement dit, à compter du 25 novembre 2021 même en cas de présomption d’existence de partie commune spéciale, la mise en conformité du règlement de copropriété nécessiterait d’obtenir la majorité de l’article 26.
Il faut tout de même noter que l’article 24 f. de la loi du 10 juillet 1965 prévoit de faire voter à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance les adaptions du règlement de copropriété rendus nécessaires par la loi.
Cette disposition entraine là aussi plusieurs analyses sachant que l’on se retrouve avec deux écoles : une première qui affirme que cet article de loi permet de maintenir la dérogation et de voter toute mise en conformité à l’article 24 et une seconde école qui considère qu’une adaptation n’est pas une mise en conformité.
Compte tenu de ce flou absolu, les chambres professionnelles ont demandé que le délai dérogatoire prévu par la loi ELAN soit prolongé.
En définitive, il faut constater que les praticiens ainsi que le ministère se retrouvent contraints d’expliquer des dispositions issues de la loi qui manquent de précision et qui au final risque de provoquer beaucoup plus de contentieux et de contestation des charges.
Nous restons vigilants sur la mise en application de cette disposition et publierons dès réception le courrier officiel de la chancellerie.