Actualités de l'association (9017)

Une simple cloison peut devenir porteuse

Catégories Procédure
Date de parution de l'article de loi
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Observations

L’article 3 de la loi du 10 juillet 1965 définit les parties communes comme des « parties des bâtiments et des terrains affectées à l'usage ou à l'utilité de tous les copropriétaires ou de plusieurs d'entre eux ». Les cloisons intérieures des logements, lorsqu’elles ne font pas partie de la structure porteuse de l’immeuble, sont considérées comme des parties privatives et sont définies comme telles dans l’état descriptif de division de la copropriété. Or, seuls les travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble sont soumis à l’autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires.

Cependant, il est possible que des travaux fragilisent la structure, et modifient la nature d’une cloison initialement non porteuse. En effet, même non qualifiée de partie commune dans l’état descriptif de division, elle l’est devenue de fait par la définition supplétive qu’en donne l’article 3, ce qui nécessite une décision de l’assemblée générale pour les autoriser…

Principe retenu

Le copropriétaire qui, avant de vendre son logement, effectue sans précautions des travaux sur une cloison mise en compression par l'effet de la réalisation d'aménagements et l'adjonction de cloisons dans les appartements supérieurs, est responsable des dommages causés à l’immeuble par ses travaux et doit les réparer. En revanche, il ne peut être tenu pour responsable de défaut d’information à l’égard de son acquéreur, susceptible de justifier une annulation de la vente, faute d’intentionnalité dans l’insuffisance d’information pour qu’elle soit qualifiée de dolosive…

Analyse de la décision

Le plancher d’un appartement d’une copropriété, récemment acheté, s'est affaissé. L'acquéreur a, après expertise, assigné le vendeur en indemnisation de ses préjudices sur le fondement notamment de la « réticence dolosive » d’information, reprochant en clair à son vendeur ne pas l’avoir informé de la suppression d’une cloison des locaux, à l’origine de l’affaissement constaté.

Le syndicat des copropriétaires est également intervenu volontairement à l'instance en sollicitant réparation de ses préjudices du fait de l’atteinte au plancher affaissé.

Le vendeur voit sa responsabilité mise en cause par la Cour d'appel de Paris à l’égard du syndicat des copropriétaires. Celle-ci a relevé que les cloisons intermédiaires, objet de la démolition décidée par le vendeur antérieurement à la vente, réputées de simple distribution et sans effet porteur, avaient, antérieurement à leur enlèvement, été mises en compression par l'effet de la réalisation d'aménagements et l'adjonction de cloisons dans les appartements supérieurs. Ce qui avait rendu nécessaire le renforcement de la structure et fait ainsi ressortir que ces cloisons, étant devenues porteuses, les travaux entrepris affectaient les parties communes, de sorte que leur enlèvement requerrait l'autorisation de l'assemblée générale, laquelle n'a pas été sollicitée. Celle-ci lui reproche d’avoir entrepris ces travaux sans précaution, la Cour d'appel a déduit qu’il avait engagé sa responsabilité à l'égard du syndicat des copropriétaires et devait, par conséquent, être tenu à réparation à hauteur de la somme dont elle a souverainement apprécié le montant.

L’acquéreur s’est pourvu en cassation mais son pourvoi a été rejeté.

Mais les juges d’appel ont également fait droit aux demandes de l’acquéreur, considérant que le vendeur était également responsable du préjudice causé par ces désordres. Ils ont relevé pour cela, au vu du rapport d'expertise, que le vendeur avait réalisé, plusieurs années auparavant, des travaux de démolition de cloisons, ce qui avait immédiatement justifié le renforcement de la structure de l'immeuble par la pose de sabots.

Si le vendeur n'avait pas pu avoir connaissance du vice affectant le bien cédé, puisqu'il pouvait croire que les travaux confortatifs réalisés en 2002 avaient été suffisants pour stabiliser le plancher de l’appartement situé au-dessus du lot vendu, il lui appartenait cependant d'informer l'acquéreur de ces désordres ainsi que des travaux de reprise réalisés postérieurement, ce qui aurait permis à ce dernier de s'assurer du bon état structurel de l'immeuble et de la pérennité des mesures prises.

La Cour de cassation ne suit pas la cour d’appel sur ce terrain. Pour établir le caractère dolosif de la rétention d’information, il manque la preuve d’une intentionnalité. En effet, aux termes de l'article 1116, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction applicable à l’espèce, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que sans ces manœuvres l'autre partie n'aurait pas contracté.