DOSSIER DU MOIS DE JANVIER 2016
Comment déceler les premiers symptômes d’une copropriété en situation de fragilité et comment l’ARC peut vous aider ?
On a longtemps pensé que les copropriétés en difficulté voire fragiles, concernaient principalement les immeubles anciens dans des quartiers populaires. Or, on constate que de plus en plus de copropriétés récentes, voire neuves, basculent dans les difficultés. Nous y avons consacré une conférence lors de notre salon indépendant d’octobre 2015 : www.arc-copro.com/7xaa.
L’ANAH (Agence Nationale pour l’Habitat) estime par ailleurs à près de 15 % le nombre de copropriétés potentiellement fragiles, c’est-à-dire qui auront du mal à faire face, à la fois au niveau de leurs charges qui augmentent et à la fois aux besoins d’entretien (rapport de l’ANAH de 2012 : www.arc-copro.com/8v8q).
Nous allons dans ce dossier du mois présenter les premiers symptômes « pathogènes » en copropriété, qui doivent alerter le conseil syndical afin que des mesures rapides soient prises et la façon dont l’ARC peut vous aider.
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I. Une copropriété ayant une composition juridique complexe
L’expérience a pu démontrer que les copropriétés ayant une composition juridique complexe avaient plus de risques de rencontrer des problèmes de gestion. C’est notamment le cas des copropriétés imbriquées dans une ASL (Association Syndicale Libre), ou bien qui appartiennent à un syndicat principal. Cette complexité est d’autant plus prégnante si la copropriété ou la structure de gestion regroupe des lots ou des immeubles dont la « destination » est différente : habitation, commerces, parkings, HLM…
Malgré ce constat, on remarque que certaines villes ou promoteurs reproduisent aujourd’hui ces mêmes configurations en construisant des copropriétés dépendantes les unes des autres, créant, par exemple, des « volumes » de commerces, de logement social, de copropriété, augmentant ainsi les risques de fragilité.
En prévention, le conseil syndical devra autant que possible simplifier la gestion de la copropriété, en la rendant la plus autonome et indépendante possible des autres structures ou copropriétés.
Pour ce faire, il faudra prévoir par exemple des sous-compteurs pour chaque équipement de chauffage partagé, ce qui permettra d’identifier la consommation propre à la copropriété. Il faudra aussi privilégier pour la copropriété un cabinet de syndic différent de celui de l’ASL ou du syndicat principal, etc.
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II. Un nombre important d’équipements collectifs
De la même façon que la superposition d’instances de gestion (ASL, syndicat principal…) peut alourdir la gestion, mais aussi les charges (un syndic, une assurance, etc. pour chaque instance), le nombre d’équipements et de services dont dispose la copropriété peut accroître le risque de dérive financière.
En effet, les copropriétés ayant un nombre de lots important avec plusieurs types de postes de dépenses comme le chauffage, l’ascenseur ou encore des employés d’immeuble, ont un risque plus important d’augmentation de leurs dépenses - plus difficiles à maîtriser - pouvant entraîner rapidement une dérive financière de la copropriété.
Par ailleurs, cette dérive des charges peut entraîner d’autres difficultés, comme l’impossibilité pour les copropriétaires les plus modestes d’assumer leurs charges, créant ainsi des situations d’impayées ou bloquant les projets de travaux.
C’est pour cela que dans ce type d’immeuble, il faut rapidement identifier les postes de charge en dérive ou mal cadrés afin de mettre en place une démarche de maîtrise des charges efficace.
L’ARC a d’ailleurs mis en place plusieurs outils à destination des conseillers syndicaux, leur permettant d’identifier les postes de charges mal maitrisés. Il s’agit principalement d’OSCAR, l’Observatoire des charges de l’ARC, qui permet de se référer à des moyennes de charges par mètre carré en fonction des caractéristiques propres à la copropriété.
En parallèle de cet observatoire, l’ARC a mis en place des services d’assistance qui permettent d’aider les conseillers syndicaux adhérents à réduire leurs charges.
Il s’agit en particulier du groupement d’achat, assuré par Copropriété-Services, la coopérative technique de l’ARC, qui permet de faire des économies substantielles par rapport aux tarifs du marché (sur les commandes de fioul, de lampes électriques basse consommation, de fournitures de petit matériel pour la copropriété, etc.).
L’ARC a par ailleurs créé un outil gratuit accessible à tous : le Bilan Initial de Copropriété (BIC www.arc-copro.com/u6f5), qui permet de faire son BES (Bilan Energétique Simplifié) pour vérifier si les consommations de chauffage sont maîtrisées et de contrôler la qualité de gestion et de fonctionnement de la copropriété.
De nombreux outils sont aussi à la disposition de nos adhérents pour vous aider à suivre l’évolution des postes de charges, renégocier et mettre en concurrence vos contrats d’entretien, etc.
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III. Un budget prévisionnel qui augmente plus vite que l’inflation
Un des indicateurs permettant d’identifier des risques de difficultés pour la copropriété est l’augmentation significative des charges. En effet, à partir du moment où les charges sont bien maîtrisées, leur augmentation doit être extrêmement faible et, en tout état de cause, inférieure à l’inflation.
Mais là encore, l’ARC a toujours affirmé que l’augmentation des charges n’était pas une fatalité et que dans bien des cas il est possible de réduire ses charges de gestion courante ou au moins de les maintenir à un niveau stable.
Plusieurs moyens simples ont été développés par l’ARC pour arriver à ce résultat, notamment « La boite à outils de la maîtrise des charges » qui permet de présenter les solutions aidant les conseillers syndicaux et les syndics bénévoles à la réduction des charges de copropriété.
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IV. Un taux d’impayés de charges qui augmente d’un exercice à l’autre
Une des principales alertes indiquant que la copropriété est en fragilité, voire en difficulté, est l’augmentation du taux d’impayés.
En effet, si on peut admettre que, dans une copropriété, il peut y avoir des copropriétaires débiteurs, cela doit rester extrêmement marginal et, dans tous les cas, maîtrisé.
À partir du moment où le taux d‘impayés ne diminue pas, mais au contraire, augmente d’un exercice à l’autre et que les procédures nécessaires au recouvrement ne sont pas engagées par le syndic ou n’aboutissent pas au recouvrement des charges, cela doit être pris au sérieux et doit être rapidement traité par le conseil syndical afin que la situation soit améliorée.
Nous considérons qu’un taux supérieur à 20 % du budget annuel est déjà largement significatif. À partir de 25 %, c’est le seuil de déclenchement de la procédure d’alerte.
L’ARC propose d’ailleurs à ses adhérents un contrôle permettant d’analyser si les impayés de charges sont bien traités par le syndic et, à défaut, de préconiser des actions pour améliorer le recouvrement (contrôle ciblé sur les impayés).
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V. Un retard chronique de paiement des fournisseurs
En pratique, le syndic doit être en mesure de payer les factures au jour de leur réception. Néanmoins, il est fréquent de constater que certains syndics retardent le paiement des factures jusqu’à 90 jours, voire plus.
Cela est principalement dû au fait que le syndic place à son profit la trésorerie de ses copropriétés mandantes, lorsqu’elles ne disposent pas de compte séparé, retardant ainsi le paiement des fournisseurs.
Au-delà des pénalités que certains fournisseurs imputent quasi automatiquement au syndicat de copropriétaires à cause des retards, cette situation ne privilégie pas une relation de confiance avec les fournisseurs, qui sont moins disposés à travailler avec la copropriété.
Ce climat défavorable entraîne à la longue une augmentation des charges (les fournisseurs surfacturent pour compenser le retard) et une gestion plus difficile de la copropriété, même si cette pratique risque de diminuer grâce à l’obligation - sans dérogation possible - de gestion en compte bancaire séparé pour les copropriétés de 15 lots et plus.
Pour toutes les autres, l’ARC conseille de ne pas voter en assemblée générale la dispense accordée au syndic d’ouvrir un compte bancaire séparé. Le syndic ne peut désormais plus demander d’honoraires supplémentaires si l’assemblée générale refuse la gestion en « compte global ».
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VI. Une relation difficile entre le conseil syndical et le syndic
Cet élément, qui peut paraître anodin, est en réalité essentiel. En effet, si le syndic a en charge la gestion de la copropriété, il revient au conseil syndical de l’assister et de contrôler sa gestion. C’est pour cela qu’il est essentiel de mettre en place une collaboration efficace entre le conseil syndical et le syndic.
En effet, on a pu constater que dès que les relations entre le syndic et le conseil syndical deviennent tendues ou se dégradent, la gestion de la copropriété en pâtit. Une bonne relation entre le conseil syndical et le syndic est en effet le point de départ à des charges bien contrôlées et bien maîtrisées, à des impayés bien traités, etc.
C’est pour cela que le syndic devra mettre en place avec le conseil syndical une méthode de travail afin d’assurer un partage efficace des rôles et une bonne communication (réponse aux questions, transmission des documents, …).
Quant au conseil syndical, il devra aussi s’organiser en interne afin que chacun des membres puisse se spécialiser dans un domaine ou sur un problème propre à la copropriété. La personne ainsi désignée sera la référente pour échanger avec le syndic ou remonter l’information au président du conseil syndical. Cela évitera que plusieurs membres du conseil syndical ne sollicitent le syndic pour une même question, faisant perdre inutilement du temps au gestionnaire.
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VII. Un conseil syndical peu ou mal formé
Bien souvent, une copropriété bascule dans les difficultés, car elle n’a pas su répondre de manière efficace à un problème ou un enjeu important.
Un conseil syndical bien formé peut alors faire toute la différence en apportant les informations nécessaires pour aborder sereinement une question ou un problème de fond de la copropriété.
En effet, les gestionnaires de cabinets de syndic n’ont pas forcément l’ensemble des connaissances nécessaires pour répondre à des questions techniques pointues comme celles relatives aux ascenseurs ou au chauffage ou peuvent ne pas avoir intérêt à régler un problème (exemple : syndic lié au promoteur qui n’engagera pas la responsabilité du promoteur en cas de problème).
Le conseil syndical, surtout lorsqu’il est assisté par un professionnel ou une association comme l’ARC, peut alors collaborer avec son syndic pour répondre aux enjeux de la copropriété et faire intervenir les bons spécialistes.
Cela a deux avantages majeurs :
- le conseil syndical sera « acteur » des décisions et des choix de la copropriété ;
- aucun soupçon de conflits d’intérêts ne pourra être invoqué à l’égard du syndic à la suite des décisions qui seront prises.
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VIII. Un « turnover » trop important de gestionnaires administrant la copropriété
Il n’est jamais bon pour le syndicat des copropriétaires que plusieurs gestionnaires successifs administrent la copropriété.
En effet, si cela est le cas, le gestionnaire n’aura pas assez de recul sur l’historique de la copropriété, pour lui permettre de répondre de manière précise et efficace à une question du conseil syndical ou bien pour faire face à un problème spécifique que rencontre la copropriété.
Par ailleurs, si le syndic est confronté à des difficultés pour maintenir ses gestionnaires au sein de son cabinet, cela peut être un signe de mauvaise organisation ou du moins, de distorsion importante entre la politique directionnelle et la pratique des gestionnaires.
Par ailleurs, il est important que la relation construite entre le conseil syndical et le gestionnaire soit efficace, ce qui est plus difficile quand les interlocuteurs changent souvent.
Cet élément doit être pris en considération, car cela pourrait avoir des répercussions sur la bonne gestion de la copropriété.
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IX. Un règlement de copropriété non conforme à la réalité de la copropriété (copropriétés nouvelles)
À plusieurs reprises, nous avons constaté que les règlements de copropriété d’immeubles neufs n’étaient pas conformes à la réalité du fonctionnement et des usages.
Cela s’explique généralement par le fait que le règlement a été rédigé par le promoteur, avant même que la copropriété ne soit complètement achevée, créant alors une distorsion entre les dispositions du règlement de copropriété et le fonctionnement de l’immeuble.
C’est par exemple le cas de salles de réunion ou d’emplacements de parking non prévus dans le règlement de copropriété ou pire encore, de l’absence d’une grille de répartition des dépenses de chauffage.
Dans ce cas, il faut dans les plus brefs délais saisir le promoteur pour qu’une mise à jour du règlement de copropriété soit effectuée.
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X. Une proportion importante de copropriétaires bailleurs
Une des causes à l’origine des copropriétés en difficulté est le taux important de copropriétaires bailleurs.
En effet, dans la plupart des cas, ces copropriétaires achètent un lot dans un objectif d’investissement, souhaitant avoir un retour financier le plus rapidement possible.
À ce titre, ils ont tendance à être plus réticents à voter la réalisation de travaux, qui sont pour eux des charges non récupérables qui diminuent leur « rentabilité locative ».
Bien évidemment, dans certains cas, les copropriétaires bailleurs ont une vision patrimoniale à plus long terme et savent que la réalisation de travaux au sein de la copropriété permettra d’entretenir l’immeuble et donc de valoriser leur bien immobilier. Mais la règle veut que l’équilibre entre les propriétaires occupants et les propriétaires bailleurs, est important.
Par ailleurs, l’augmentation importante de bailleurs sur une copropriété peut être le signe de la dégradation de la qualité de vie sur l’immeuble, ce qui doit être un signe d’alerte, sachant que les bailleurs - n’étant pas souvent sur place - participent moins aux instances de gestion (assemblées générales, conseil syndical).
Il faut donc surveiller les ventes au sein de la copropriété, et si elles deviennent trop importantes, se demander pourquoi (charges en dérive ? dégradations liées à des travaux non réalisés ? etc.) pour essayer d’en traiter les causes.
Conclusion
Vous savez maintenant ce qui doit vous alerter et vous pousser à réagir. Pour en savoir plus, vous pouvez par ailleurs vous reporter à notre guide VUIBERT : « Traiter les copropriétés fragiles ou en difficulté » ou à notre guide en téléchargement pour nos adhérents collectifs : « Copropriétés fragiles : le mode d’emploi du redressement ».