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Recevabilité de l'action du syndicat des copropriétaires : quand les préjudices affectent les parties privatives
précisions sur la capacité d'action du syndicat des copropriétaires en matière de réparation de préjudices affectant les parties privatives et communes.
En application de l'article 15 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, un syndicat des copropriétaires a qualité pour agir en réparation de dommages ayant leur origine dans les parties communes et affectant les parties privatives d'un ou plusieurs lots. Il n'est pas nécessaire, en ce cas, que le préjudice, qu'il soit matériel ou immatériel, soit subi de la même manière par l'ensemble des copropriétaires
La recevabilité de l’action du syndicat des copropriétaires en réparation de préjudices affectant les parties privatives, mais ayant pour origine des désordres dans les parties communes, a été fréquemment examinée devant la Cour de cassation.
Dans un arrêt du 7 novembre 2024, la Cour de cassation a clarifié cette question, en renforçant la protection des copropriétaires, ainsi que la préservation de l’intérêt collectif.
I – La recevabilité de l'action syndicale en cas de préjudices liés aux parties communes et privatives :
Le syndicat des copropriétaires d’un immeuble a confié à une entreprise des travaux de ravalement de façade et d’étanchéité de terrasses et balcons, sous la maîtrise d’œuvre d’un architecte assuré.
Suite à des désordres constatés ( des infiltrations notamment), le syndicat des copropriétaires a assigné les intervenants à savoir l’entrepreneur, son assureur, l’architecte et sa compagnie d’assurance en réparation des préjudices matériels et de jouissance subis par certains copropriétaires. Ici seuls quatre copropriétaires étaient concernés.
La cour d'appel d'Aix-en-Provence avait déclaré irrecevable cette action, estimant que les préjudices devaient présenter un caractère collectif et être supportés de manière identique par tous les copropriétaires. (CA Aix-en-Provence, 26 janv. 2023).
Le syndicat des copropriétaires a alors formé un pourvoi en cassation.
Dans la présente affaire, il convient de déterminer si le syndicat des copropriétaires est en droit d'agir en réparation de préjudices affectant les parties privatives, lorsque ces dommages trouvent leur origine dans des désordres touchant les parties communes, et ce, même si tous les copropriétaires ne sont pas affectés de manière identique
La cour d'appel avait estimé que l'action du syndicat n'était recevable que si les préjudices étaient collectifs et supportés de manière identique par tous les copropriétaires ou une grande partie d'entre eux.
Dans son analyse, la cour d’appel ne remet pas en cause la possibilité pour le syndicat d'agir en réparation de préjudices liés à des désordres affectant les parties communes, mais conditionne strictement la recevabilité aux seuls cas où ces préjudices sont uniformes et identiques.
La Cour de cassation a cassé partiellement l'arrêt de la cour d'appel, en ce qu'il déclarait irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires au titre des préjudices matériel et de jouissance subis par quatre copropriétaires.
Elle considère sur le fondement de l'article 15 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, qu’un syndicat des copropriétaires a qualité pour agir en réparation de dommages ayant leur origine dans les parties communes et affectant les parties privatives d'un ou plusieurs lots, sans qu'il soit nécessaire que le préjudice soit subi de la même manière par l'ensemble des copropriétaires.
II – Une clarification jurisprudentielle attendue
Cette clarification est la bienvenue lorsque l’on analyse les précédentes jurisprudences en la matière.
En effet, la Cour de cassation a évolué au fil du temps concernant la recevabilité de l'action en justice du syndicat des copropriétaires.
Initialement, elle exigeait que l'action syndicale pour être recevable devait porter sur des préjudices dont le trouble était subi de manière identique par l'ensemble des copropriétaires (Cass. 3e civ., 10 oct. 1984, n° 83-14.811.)
Puis, elle a semblé abandonner cette position en estimant que « le syndicat des copropriétaires a qualité pour agir en réparation des dommages ayant leur origine dans les parties communes et affectant les parties privatives d'un ou plusieurs lots ».(Cass. 3e civ., 23 juin 2004, n° 03-10.475)
Elle est par la suite revenue sur sa position en considérant à nouveau que la compétence du syndicat était subordonnée à la condition que l'ensemble des copropriétaires de l'immeuble supporte un préjudice identique dans leurs parties privatives (Cass. 3e civ., 26 avr. 2006, n° 05-10.500 – Cass. 3e civ., 7 sept. 2011, n° 09-70.993 : Bull. civ. III, n° 140).
Par ailleurs, cette approche pragmatique vise à assurer une réparation complète et effective des préjudices, en évitant que des copropriétaires ne soient privés de recours en raison de la spécificité de leur situation. Au-delà, la position de la Cour de cassation semble également se justifier par la préservation de l’intérêt collectif de la copropriété.
En effet, cette dernière prend en compte les conséquences que pourrait entraîner l'absence de réparation de tels préjudices sur les parties communes, quand bien même ces derniers ne concerneraient qu’un ou plusieurs lots. Cette action en réparation de la part du syndicat des copropriétaires matérialise l’intérêt de ces derniers en vue de la conservation ainsi que de la sauvegarde matérielle de l'immeuble.
En effet, elle renforce la capacité d'action du syndicat des copropriétaires, lui permettant de défendre devant les tribunaux les intérêts des copropriétaires affectés individuellement par des désordres d'origine commune.
En somme, elle assure une meilleure protection des droits des copropriétaires, en élargissant les possibilités d'action en justice pour obtenir réparation des préjudices subis.