L’administration d’une résidence par un syndic implique des dépenses d’entretien des parties communes, et parfois un produit, à savoir une somme créditrice au profit de cette collectivité. Ce montant correspond à une indemnité d’une police de l’immeuble, du cabinet défaillant (ou de ses assureurs) ou encore le prix de location ou de cession d’un bien immobilier appartenant au syndicat. Les copropriétaires se questionnent sur le moyen de sécuriser cette créance exceptionnelle vis-à-vis du syndic, en raison de craintes sur son évaporation. Existe-t-il un moyen, pour le syndicat des copropriétaires, de protéger cette somme ?
I. Sécurisation du produit du syndicat : placement sur un compte à terme négocié
Le maintien par le syndic, de la trésorerie du syndicat des copropriétaires sur les comptes bancaires séparés (courant et rémunéré) de ce dernier, n’est pas garanti, que cette affectation résulte de son obligation légale (art. 18 de la loi du 10 juillet 1965) :
- de versement, sans délai, du fonds travaux obligatoire sur le support portant intérêts ;
- d’exécution des délibérations de l’assemblée.
Tout manquement en la matière constitue une faute grave, qui l’expose à :
- la nullité de plein droit de son mandat (via une décision de justice, Cass 3e civ. 13 février 2007, n° 06-15795) ou la résiliation de celui-ci (par une décision de l’assemblée), art.18 de la loi ;
- une action judiciaire civile visant à sa condamnation à se conformer à cet impératif légal, voire en indemnisation (tout comme ses assureurs) du préjudice du poursuivant dans l’inapplication par exemple d’une résolution de l’assemblée, Cass 3e civ 4 octobre 1995, n° 94 - 12048.
Ce cadre légal ne préserve donc pas le syndicat contre la gestion illicite des comptes séparés du syndicat par le syndic, telle que le règlement d’interventions courantes par la réserve imputée sur celui rémunéré et dédiée au financement d’interventions exceptionnelles (art. 14-2-1 de la loi) :
- c’est-à-dire de travaux collectifs ne relevant pas du budget prévisionnel de fonctionnement ;
- malgré l’absence de la décision préalablement nécessaire de l’assemblée souveraine.
Cette situation s’explique par le fait, que le syndic est le seul à pouvoir effectuer des opérations sur les comptes bancaires séparés du syndicat des copropriétaires, en sa qualité d’unique représentant légal de cette collectivité chargé de son administration (art. 18 de la loi).
Dès lors, la seule solution juridique, pour la sécurisation accrue d’un produit du syndicat des copropriétaires, consiste à ce que son assemblée opte pour l’ouverture d’un compte à terme et le placement sur celui-ci de cette créance par le syndic, et ce, à une date déterminée.
Le compte à terme est un produit garanti (monétaire) sur lequel le client s’engage à déposer une somme pour une durée précise, bénéficiant en contrepartie d’une rémunération majorée.
Comme tout contrat du syndicat, sa conclusion implique une résolution antérieure de l’assemblée selon les éléments essentiels (proposition conventionnelle de la banque) annexés à sa convocation notifiée aux copropriétaires (art. 11 al. 3 du décret du 17 mars 1967).
Il conviendra de veiller à ce que le projet de contrat comporte une clause par laquelle, toute action du syndic sur ce compte [à échéance ou anticipée (clôture dérogatoire)] requiert, de celui-ci, la présentation préalable au conseiller financier, d’une décision concordante de l’assemblée.
En cas de manquement de vigilance du banquier sur ce point, il engagera sa responsabilité à l’égard du syndicat lésé. Le client victime disposera de deux parties répondant de son dommage : la banque et le syndic, ainsi que les assureurs de ce dernier, dont sa garantie financière.
II. Sécurisation du produit du syndicat : un contrôle bancaire renforcé du conseil syndical
Outre cette stipulation sur le compte à terme, le conseil syndical a un rôle essentiel à jouer, dans le traitement licite de ce support par le syndic. Il s’agit pour cet organe collégial de remplir pleinement sa mission de contrôle et d’assistance du syndic dans sa gestion (art. 21 de la loi).
Pour mener à bien cette fonction, le législateur impose notamment au syndic de transmettre au conseil syndical, les relevés périodiques des comptes bancaires séparés du syndicat, dès réception de ceux-ci par l’établissement financier dépositaire (art. 18). Et ce texte de préciser, que toute carence du syndic, dans les trois mois de sa désignation en assemblée, vaut nullité de plein droit de son mandat (évoquée précédemment).
Sans en arriver là, l’alternative amiable consiste à insérer dans la convention d’ouverture des comptes séparés du syndicat, une clause au profit du conseil syndical prévoyant, soit :
- l’envoi de relevés périodiques au référent de cet organe collégial par l’établissement financier ;
- un accès internet consultatif sur ceux-ci, c’est-à-dire sans possibilité d’y effectuer la moindre opération, cette faculté demeurant au seul syndic, unique mandataire légal de cette collectivité.
Dans les deux cas, il faudra communiquer au banquier une copie du procès-verbal de l’assemblée de nomination du conseil syndical, ainsi que ses coordonnées électroniques ou postales.
Enfin, il faut rappeler que le conseil syndical jouit d’un droit permanent d’accès ou de copie à tout document du syndicat auprès du syndic (art. 21 de la loi). Cette disposition institue une pénalité journalière fixée réglementairement à 15 € (art. 2 du décret du 7 octobre 2020), si le syndic contrevient à toute demande légitime (déterminée sur son objet et périodes) au-delà d’un mois. Elle représente donc une approche accessoire d’obtention par le conseil syndical, auprès du syndic, des relevés périodiques du compte à terme du syndicat, en cas d’échec de la voie initiale.
Un compte à terme bien ficelé peut constituer une source de sécurisation maximisée d’un produit important du syndicat. Néanmoins, toutes les précautions apportées ne s’avèrent pas infaillibles, face aux agissements de syndics professionnels et de leurs partenaires bancaires complaisants. En conséquence, le conseil syndical doit exercer une vigilance accrue et constante de la situation de ce compte séparé rémunéré, à l’aide notamment de ces relevés périodiques édités par l’établissement financier dépositaire.